Aquilon méridional

Maxime Argentine 19 Commentaires

« Votre vélo arrivera peut-être avec le prochain avion, il faut attendre » me dit-on à l’aéroport d’El Calafate.

Après 50 heures de transport, je me serais bien passé de cette étourderie de la compagnie Aerolineas Argentina. Je profite néanmoins de ce contre temps pour rentre visite à un grand monsieur de la région et attraction majeure du Parque Nacional Los Glaciares , le glacier Perito Moreno.

Fatalement je me retrouve dans un flot de touristes dont certains « bouclent la Patagonie » en dix jours puis partent « faire la Bolivie ». Cela ne m’empêche pas d’être bluffé à la vue de cette merveille de la nature, son spectacle est saisissant. Je suis de plus impressionné par la bonne conservation du site et le réel enthousiasme et la fierté des guides pour leur patrimoine.

Deux jours passent et pas moins de dix « prochain avions » plus tard, je récupère enfin ma bicyclette et la prépare pour tailler les routes de Patagonie. Je fais le plein de nourriture et d’eau car je ne sais pas vraiment à quoi m’attendre. Le pamperos, fameux vent de Patagonie soufflant continuellement plein est dont la puissance oscille entre forte et surpuissante, m’accompagne pour quitter El Calafate et rejoindre la Ruta 40. J’avale les 30 premiers kilomètres de pampa à une vitesse ahurissante jusqu’à l’intersection de la cuarenta. Je suis désormais balayé comme une feuille par un vent transversal et mets fréquemment le pied à terre pour ne pas finir dans le bas côté. Sur une route sans fin je roule incliné tel un motard dans un virage pour résister aux assauts sur mon flanc gauche. J’anticipe le croisement des camions coupant la ligne du vent en me relevant pour un instant.

Le paysage est vide, rien ne pousse ou presque dans ces plaines asséchées. Peu ou pas de trafic sur ces routes. Ma première rencontre avec la steppe. Parfois un magnifique lac turquoise jure dans cette immensité brune. Mes lèvres se gercent, du sable est soulevé par les bourrasque, le soleil me cuivre. Je roule entre ciel et terre.

Pour rejoindre El Chalten, une épreuve m’attend. La route 23 d’est en ouest. Le pamperos de face pendant 90 km, autrement dit un vrai calvaire, un cauchemar. Je prends le pouls de cette route en fin de journée et après une heure et seulement 5 km d’effectués, je sardine solidement ma tente et espère rouler pendant une supposée accalmie nocturne. Pas de chance à mon réveil à 3h, le vent n’a  pas faibli. Je mange une bonne ration de pâte et démarre à 4h30 une journée marathon. Je pédale pendant des heures avec les plus petits développements les yeux rivés sur le poème Le Voyage I de Baudelaire affiché dans le porte-carte. Le vent siffle fort dans mes oreilles à m’en empêcher de penser.

Surprise au bord de la route, une petite butte salutaire ! J’en profite pour démarrer mon réchaud et reprendre des forces avec force nouilles. Carol , une cycliste voyageant en sens inverse me dit que ma destination est encore à 41 kilomètres et m’indique un endroit où les cyclistes peuvent y camper gratis. 6h30 pour 44 kilomètres, la moisson est maigre mais la perspective d’hébergement me fait reprendre la route. Heureusement par moment le vent réduit d’intensité et je me propulse parfois au-delà de la barre des 10 km/h. A 17h30, j’entre enfin dans El Chalten complètement au bout du rouleau après 10 heures de pédalage et campe dans le jardin de Mario en compagnie de nombreux cyclistes !

J’y rencontre Josh’, un anglais reliant Ushuaia à l’Alaska et décidons de continuer un bout de route ensemble. Le programme est de rejoindre la frontière chilienne et le village situé à l’extrémité sud de la Carretera Austral, Villa O’Higgins. Le seul chemin existant n’est pas adapté aux vélos chargés et tous les voyageurs venant en sens inverse nous l’ont confirmé: « vous allez en chier ».  Rien de tel pour nous motiver !

Commentaires 19

  1. Line

    Tes photos sont juste… MAGNIFIQUES!!!!! Ca fait tellement rêver !!!!! J’espère que tu arrives quand même à apprécier les paysages malgré le vent :-S

  2. flavio et delphine

    Et voilà!!! Ca veut dire qu’ en fin le destin est de se revoir?!? Arrivée le 11 fev. à Puerto Montt, direction Punta Arenas… Que dire, a bientot??
    Evviva la Carretera Austral e los amigos, buen viaje
    Flavio e Delphine

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      Maxime

      Hey Flavio & Delphine !
      quelle bonne surprise, on va se croiser c’est sûr, il n’y a pas 36’000 routes par là bas 🙂 Peut-être vers Coyhaique ou plus au nord !
      A bientôt

  3. Alb.

    Merci pour ces nouvelles et pour le voyage que tu nous fais vivre… Un peu…

    J’ai lu une phrase qui m’a fait penser à toi aujourd’hui:
    On a la chance d’être venus au monde. En faire le tour au moins une fois serait la moindre des politesses.

    Bonne route!

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  4. flavio et delphine

    Salut Maxime,
    l’idée est de passer par Chiloé au debut, mais on repart pas son te croiser!!!
    Pour l’instant on te suis sur le web,
    a bientot

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  5. Grég

    Superbe ta première étape. Le coin a vraiment l’air magnifique. Merci pour ce récit et ces belles photos!
    Bon courage et bonne continuation.

    A+

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  6. Thomas

    Encore un texte super et des photos incroyables ! Tu l’auras eu ton vent de Patagonie dans la figure, apparemment aussi gênant que prévu 😉

    Tu penseras à faire le plein de patates avant de partir du camp…! J’attends le récit de ça aussi hein. C’est extra ce que tu fais, je crois qu’on aimerait tous être à ta place.

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  7. mica

    Merci et bravo pour ce récit d’une étape contre le vent (pire que la pluie pour les cyclistes). Même si l’on ne se connait pas, j’ai entendu parlé de ton site et depuis, je te suis avec un sincère intérêt. Bravo pour les photos et bon courage pour la suite.

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      Maxime

      Hello Mica,
      merci pour ton message. Quand la pluie se met à tomber pendant une journée – fréquemment ces temps – , j’en arrive même à regretter ce vent qui garde tout au sec !

  8. Giorgio

    C’est toujours super de te lire et tu donnes envies d’aller de l’autre coté de l’atlantique. ça doit etre trop bien en plus de croiser d’autres cyclistes. Moi a cause de mon genoux je me suis arreté dans un hotel ou maintenant je travaille en tant que chef cuisinier 🙂 pas mal le genoux va de miex en mieux et je compte reprendre la route dans un mois.

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      Maxime

      Salut Giorgio !
      trop la classe d’avoir trouvé ce poste comme cuisto, comme quoi c’est peut-être un signe pour l’avenir ! J’espère que tes deux genoux tiendront le coup pour ta reprise 🙂

  9. António

    Hello Maxime, quelques photos? Very nice. And the IKEA bag did work. What a mess with your bike included. You look very well. The wind its not a helper? 10 heures!? Uff!

    Et le « vous allez en chier »? Did you pass it? Bye. Good luck. Hope to see you well. Bye António

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      Maxime

      Hi Antonio !
      yeah thanks for the bags. I filled and stacked both bags up each others and wrapped them with meters of cling film. it worked perfectly !
      Thank you for writing, the next tale about crossing will be online soon 🙂

  10. Cristina

    Olá Max! Saudades de Portugal? 🙂
    How is the food over there? Are you missing portuguese « bacalhau »?
    Well, the views are so overwhelming that you almost don’t need to eat 😉
    Don’t forgett to write the postcard from the end of the world!
    Bon voyage!!

    1. Post
      Author
      Maxime

      Ugh ! don’t talk about portugese food, please, I’m missing almost everything here (except pig ears you made me eat…!).
      I’m gonna write you a postcard for sure but they told me: « If you want your postcard to arrive, you better send it later, further north, in the city ! »

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